L’accord commercial actuellement négocié entre l’Union européenne et les États-Unis a pour but de créer une zone de libre-échange transatlantique. Cet accord se base sur des principes déjà existants dans d’autres traités et négociations internationaux. Le TTIP contient trois éléments principaux : l’accès aux marchés;  l’amélioration et la cohérence de la réglementation et élimination des obstacles bureaucratiques; l’amélioration de la coopération en matière de normes et standards internationaux.

Selon les projections les plus optimistes de la Commission européenne, le TTIP pourrait générer une croissance minime de 0,5% jusqu’en 2027. Critiqué pour son manque de transparence par la société civile, le TTIP était le sujet principal lors de la campagne électorale des élections européenne de 2014.

Actuellement, le débat public est devenu extrêmement vif et la pression des ONG et de la société civile contre l’accord monte. Sur initiative des citoyens, la pétition « STOP TTIP » a atteint 2,3 millions de signataires. Les Européens craignent une baisse des standards sanitaires, techniques et environnementaux, le démantèlement des droits sociaux ainsi que la libéralisation des services publics et une perte de pouvoir des Etats face aux multinationales.

Les citoyens européens sont également préoccupés par le fait de comment cet accord traite le sujet de la sécurité alimentaire. En effet, le texte, tel que présenté par la Commission européenne, se base sur les normes de l’Organisation Mondiale du Commerce (« OMC ») et non pas sur les normes européennes qui, loin d’être parfaites, restent supérieures aux standards OMC. Il existe un grand risque de réduction des efforts de construire un système alimentaire sain et durable.

Le sujet moins débattu, mais qui selon certaines études démontre que le TTIP aurait un impact très négatif sur les pays du tiers monde, nous inquiète également. L’accord entre l’UE et les Etats-Unis entraverait  la compétitivité des produits et services de pays en voie de développement et de pays les moins avancés et provoquerait ainsi une chute des échanges commerciaux avec ces pays.

Sous prétexte de garantir aux investisseurs la protection qui sera assurée par le biais de tribunaux arbitraux, les deux parties du TTIP et du CETA veulent instaurer le mécanisme Investor-State Dispute Settlement (« ISDS ») capable de trancher les conflits entre investisseurs et États.

Ce mécanisme très controversé n’est pas nouveau, il protège les sociétés étrangères contre toute décision publique qui pourrait nuire à leurs investissements.

Selon la Conférence des Nations Unies sur le Commerce et le Développement (« CNUCED »), en 2014 le nombre total des accords comprenant le système ISDS s’élève à 3 268. Ce nombre pourrait être même plus élevé vu que l’arbitrage se fait en pleine confidentialité. Les Etats-Unis sont le pays qui a eu le plus de recours à ce mécanisme avec environ 130 plaintes.

Pour ne citer que quelques exemples, en 2004, le Mexique a perdu le procès face au groupe américain Cargil et a été condamné à une peine de 90,7 millions de dollars pour avoir introduit une taxe sur les sodas. En 2009, le groupe suédois Vattenfall a porté plainte contre l’Allemagne pour 1,4 milliards d’euros pour avoir renforcé les exigences environnementales et a attaqué la décision de la chancelière Merkel de sortir du nucléaire en 2022. Le groupe français Veolia a déposé plainte en 2012 contre l’Egypte pour avoir augmenté le salaire minimum.

En principe, les Jeunesses Socialistes Luxembourgeoises ne s’opposent pas à la baisse des barrières tarifaires et non tarifaires et à l’accroissement du commerce avec les Etats-Unis. Nous sommes cependant loin d’être convaincus que les Etats-Unis ouvriraient leur marché aux entreprises européennes, se caractérisant plutôt par une position protectionniste, favorisant la vente de leurs propres produits et l’établissement de leurs petites entreprises.

Nous nous opposons fortement à un accord qui met en danger les normes environnementales et protectrices du consommateur, les normes de santé et de sécurité dans les domaines alimentaires et agricoles, la protection des données ainsi que les droits sociaux. Or, ceci est le cas de TTIP.

D’autres textes moins médiatisés que TTIP présentent d’ailleurs les mêmes dangers, comme l’accord en cours de ratification entre l’Union européenne et le Canada, à savoir le Comprehensive Economic and Trade Agreement (« CETA »), ou encore le traité multilatéral Trade in Services Agreement (« TiSA”).

En effet, ces normes risqueraient non seulement d’être potentiellement en contradiction avec les valeurs politiques et démocratiques que nous défendons, mais on risquerait même de se diriger vers un modèle de moins-disant social et réglementaire absolu, et la pression pour la déréglementation en Europe deviendrait trop forte.

Les JSL demandent le rejet de l’arbitrage ISDS et nous déplorons que ce mécanisme, bien que modifié pour garantir plus de transparence, ait eu le feu vert de la Commission parlementaire du commerce international. Ce mécanisme de « justice privée » défendrait le seul intérêt des grands investisseurs au détriment des législations nationales. Ceci entraînerait incontestablement une perte de souveraineté des Etats qui seraient restreints dans leur flexibilité pour légiférer librement.

Entre autres, les JSL ne partagent pas le point de vue de la Commission concernant les résultats liés au TTIP. Quand bien même le PIB présenterait une croissance de 0,5 % sur dix ans – un chiffre qui est même contesté par des études indépendantes – cela n’aurait qu’un impact minime, voire aucun, sur les ménages. Les véritables gagnants du TTIP seraient les multinationales et non pas les PME et les ménages comme le prétend la Commission européenne.

Finalement, dans l’hypothèse où le Parlement européen devait approuver l’accord final, nous exigeons la ratification du TTIP par les parlements nationaux, alors que l’accord transatlantique influence fortement les réglementations nationales, et enjoignons fortement à la Chambre des députés de sanctionner cet accord.